Scientifique
08/02/17
Prise en charge des mélanomes : l’importance des marqueurs biologiques
Le mélanome est le cancer de la peau le moins fréquent mais le plus grave lorsque des métastases apparaissent : détecté de manière précoce, il peut être guéri. D’où l’importance de disposer de marqueurs pour le dépister et le soigner.
Scientifique
08/02/17
Prise en charge des mélanomes : l’importance des marqueurs biologiques
Contexte
La prise en charge d’un mélanome est complexe et repose sur plusieurs éléments cliniques (ganglions, métastases) et histo-pathologiques (profondeur de la tumeur) qui vont guider le clinicien et permettre d’établir un pronostic pour le patient et une thérapie adaptée. Le pronostic du mélanome au stade métastasique est fortement péjoratif avec un taux de survie faible de l’ordre de 2 à 3% dans les 5 ans. D’où l’importance d’un dépistage au stade précoce de la maladie (taux de guérison à dix ans proche de 90%) en l’absence de facteurs cliniques et histologiques probants. La recherche se focalise sur l’identification de marqueurs spécifiques permettant de poser un diagnostic mais également de guider l’approche thérapeutique.
Le marqueur biologique, aussi appelé « biomarqueur » correspond, selon la Haute autorité de santé (HAS), à une « caractéristique des patients pouvant représenter un indicateur de risque (ou facteur de risque), d’effet du traitement (modification d’effet du traitement) ou d’utilité de traiter (marqueur prédictif) ».
Marqueurs de diagnostic : beaucoup d’appelés, un seul élu
Melanoma inhibiting activity antigen, lipid-bound sialic acid-P, VEGF, interleukine 8… Les recherches concernant de potentiels marqueurs spécifiques du mélanome sont nombreuses. Mais peu aboutissent en réalité à l’émergence d’un marqueur reconnu pour l’identification de la maladie et son suivi. Un bon marqueur de diagnostic doit en effet concilier une forte spécificité (90%) ainsi qu’une excellente sensibilité (90%).
Ainsi, à ce jour, deux marqueurs ont été identifiés comme étant spécifiques du mélanome : LDH et S100b. Le premier est la lactate déshydrogénase (LDH), protéine reconnue comme un facteur pronostique important dans les mélanomes de stade IV (phase métastatique du mélanome selon la classification de l’American Joint Committee on Cancer, ACC). Le second – S100b – a également été retrouvé dans les mélanomes, mais il constitue un marqueur de surveillance de réponse au traitement chez les patients au stade métastatique, non pour les stades plus précoces. A ce jour, LDH est le seul marqueur reconnu par la classification de l’AJCC pour une utilisation en routine.
Promesse protéomique
La recherche se focalise désormais sur la protéomique de la tumeur, c’est-à-dire l’identification de l’ensemble des protéines. Pour disposer de nouveaux marqueurs, les études portent sur la protéomique descriptive d’expression, laquelle inclut une partie qualitative (quelles sont les protéines exprimées ?) et une partie quantitative (quelle expression pour ces protéines ?). Selon ces études, actuellement incomplètes pour une transposition clinique, la transhyrétine et l’angiotensine montrent des taux d’expression augmentés tandis que la vitamine D binding protein est diminuée. Une autre protéine, la serum amyloïde A (SAA) a été détectée comme donnant un profil d’évolution métastasique chez les patients atteints de mélanome.
- Consulter l’article : Serum proteomic profile of cutaneous malignant melanoma and relation to cancer progression : association to tumor derived alpha-N-acetylgalactosaminidase activity, Maffia & al., Cancer Letters – http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/19394758
- Consulter l’article : Detection of differentially expressed proteins in early-stage melanoma patients using SELDI-TOF mass spectrometry, Hoons & al. Annals of the NY academy of sciences, http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/15251977
D’autres recherches se sont focalisées sur le protéasome plasmatique, un complexe plasmatique d’enzymes, les protéases, lesquelles pourraient jouer un rôle dans la cancérogénèse. Il s’avère en effet que ces protéasomes plasmatiques (comparés aux marqueurs déjà connus comme LDH S) présentent plutôt une bonne spécificité et une bonne sensibilité en tant que marqueurs des mélanomes aux stades les plus avancés. Reste néanmoins à les étudier de manière plus approfondie pour délimiter précisément leur valeur pronostique
- Consulter l’article : Clinical use of p-proteasome in discriminating metastatic melanoma patients: Comparative study with LDH, MIA and S100B protein, Stoebner & al., International Journal of cancer, http://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1002/ijc.27991/epdf..
Marqueurs et traitement personnalisé
La prise en charge du patient au stade IV de la maladie est un défi pour les cliniciens puisque le pronostic est fortement péjoratif pour les patients. La stratégie, dans cette situation, est donc de trouver le bon traitement pour le bon patient.
Pour le mélanome par exemple, on sait que dans 40% des tumeurs, les mutations du gène BRAF sont retrouvées (et dans 90% de ces cas, c’est le codon 600 qui est muté, on parle de BRAF V600). Cette mutation entraine une altération de l’activité de la protéine BRAF qui favorise ainsi la prolifération anarchique des cellules tumorales. L’idée est de disposer d’une molécule inhibitrice de cette mutation qui permettrait de disposer d’un traitement directement adapté à cette mutation précise. Plusieurs molécules existent sur le marché et sont référentes dans la prise en charge des mélanomes malins métastatiques (anti tyrosines kinases, anticorps monoclonaux). C’est pour cela que l’on recherche des mutations de BRAF pour pouvoir proposer aux patients un traitement personnalisé : celle-ci se fait à partir de biopsie de tumeur ou de métastase.
Récemment, des travaux américains ont également mis en évidence que la mutation NRAS est présente chez 25% des patients atteints d’un mélanome : les chercheurs ont ensuite réussi à combiner deux molécules pour inhiber le métabolisme de NRAS.
- Davies et al. Mutations of the BRAF gene in human cancer. 2002 ; 417 : 949-54. http://www.nature.com/nature/journal/v417/n6892/full/nature00766.html
- Kwong et al. Oncogenic NRAS signaling differentially regulates survival and proliferation in melanoma. Nature Medecine. 2012 ; 18(10). 1503-10. http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3777533/
Lire l’article PIL sur les marqueurs biologiques d’efficacité
Pour en savoir plus :
- Les marqueurs pronostiques circulants du mélanome : profils protéomiques et études cliniques : Annales de biologie clinique 2011 ; 69 (2) : 151-7 http://www.jle.com/fr/revues/abc/e-docs/les_marqueurs_pronostiques_circulants_du_melanome_profils_proteomiques_et_etudes_cliniques_287816/article.phtml?tab=texte
- Circulating serologic and molecular biomarkers in malignant melanoma, Palmer SR, Erickson LA, Ichetovkin I, Knauer DJ, Markovic SN. Mayo Clin Proc. 2011 Oct; 86(10) : 981-90 : http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3184027/
- Suivi biologique du mélanome humain par deux marqueurs sériques : MIA et PS100b. C. Gelineau, N. Badel, I. Denis, L. Thomas, B. Poggi. Immuno-analyse & biologie spécialisée 17 (2002) 153-159. https://www.academia.edu/22076916/Suivi_biologique_du_mélanome_humain_par_deux_marqueurs_sériques_MIA_et_PS100_β?auto=download
- Guide méthodologique de la HAS « test compagnon associé à une thérapie ciblée » http://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2014-04/guide_meth_court_test_cpagnon_vd.pdf
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