FOCUS
Économie de la santé
11/10/18
Plan Ma santé 2022 : gradation des soins, territoire et médicalisation
Président de la République, Emmanuel Macron, a tracé, le 18 septembre dernier, les grandes lignes de la réforme de la santé, baptisée Ma Santé 2022. Ce plan d’une cinquantaine de mesures a été détaillé dans la foulée par la ministre de la Santé, Agnès Buzyn. Il a été en grande partie élaboré à partir des propositions formulées dans le cadre des cinq chantiers lancés en mars 2018, à l’occasion de la présentation de la Stratégie nationale de transformation du système de santé, et de l’avis du HCAAM du 24 mai 2018. Si l’hôpital n’est pas oublié, il n’est pas au centre de ce Plan. Il est en revanche invité à s’ouvrir sur son territoire et a été choisi pour expérimenter une nouvelle forme de rémunération au forfait.
Une approche globale
En mars 2018, le Premier ministre et la ministre de la Santé avaient initié la démarche de la « transformation de notre système de santé » en s’appuyant sur cinq chantiers thématiques :
- qualité des soins et pertinence des actes ;
- organisation territoriale ;
- mode de financement et régulation ;
- ressources humaines et formation ;
- numérique.
Les responsables de ces chantiers ont consulté et auditionné pendant plusieurs semaines les acteurs du secteur et ont rendu leurs travaux avant l’été. Leurs conclusions sont venues nourrir ou amender le plan en préparation.
Malgré le malaise croissant et l’urgence de certaines situations à l’hôpital, le Gouvernement a choisi de ne pas communiquer sur un plan hôpital mais sur un plan santé global. Un choix qui a déçu un certain nombre d’hospitaliers mais qui a été justifié par un constat fait, lui, par tous : nombre des maux de l’hôpital, en particulier celui des urgences, proviennent de la mauvaise organisation du premier recours.
En outre, le Gouvernement a choisi de construire son plan autour de la réponse aux besoins du patient. C’est sur cette base qu’il a conçu et présenté un plan constitué de trois axes principaux et d’une cinquantaine de mesures :
- Placer le patient au cœur du système et faire de la qualité de sa prise en charge la boussole de la réforme.
- Organiser l’articulation entre la médecine de ville, le médico-social et l’hôpital pour mieux répondre aux besoins de soins en proximité.
- Repenser les métiers et la formation des professionnels de santé.
Au final, si l’hôpital n’est pas le sujet central de ce programme, il est concerné par de très nombreux aspects, soit au regard de la logique globale d’organisation et de réponse aux besoins de soins, soit spécifiquement.
Trois niveaux de gradation
Ainsi, la réforme initiée par le Gouvernement entend reconfigurer l’offre de soins autour de l’idée de gradation de l’offre. Cette logique inclut la ville et le premier recours et se poursuit à l’hôpital. Trois degrés ont été définis pour structurer l’offre hospitalière :
- les soins de proximité (médecine, gériatrie, réadaptation...) ;
- les soins spécialisés (chirurgie, maternité...) ;
- les soins ultraspécialisés ou plateaux techniques de pointe (greffes, maladies rares...).
500 à 600 hôpitaux de proximité en 2022
Le Gouvernement a en outre particulièrement insisté sur la nécessaire articulation avec le premier recours. Pour cela, l’hôpital doit « penser son organisation et ses projets en complémentarité et en lien avec l’offre de soins de ville, avec l’offre de soins spécialisés hospitaliers, les services d’hospitalisation à domicile et avec le secteur médico-social de son territoire », explique le ministère de la Santé. Avec, à la clef, l’émergence « de véritables parcours de soins entre des activités de proximité́ et des activités spécialisées ».
Dans ce contexte, l’annonce phare est celle de la création des hôpitaux de proximité. Une façon de revivifier le maillage territorial hospitalier des petites structures qui ne disposent pas d’activités de chirurgie ni d’obstétrique. Le nombre de ces établissements, dont les premiers sont censés être labellisés en 2020, devrait être de cinq à six cents d’ici 2022. Leur champ de compétences est défini ainsi :
- des activités de médecine polyvalente, soins aux personnes âgées, soins de suite et de réadaptation ;
- un suivi des maladies chroniques les plus fréquentes ;
- des consultations avancées de spécialités médicales et chirurgicales avec le support des établissements voisins ;
- des plateaux techniques ouverts aux professionnels de santé de ville (imagerie, biologie et explorations) ou un accès organisé avec les établissements voisins ;
- des équipes mobiles de soins ;
- des équipements de télémédecine.
Réorganisation hospitalière
Toujours dans la logique de gradation des soins, le Gouvernement annonce la poursuite de la restructuration hospitalière à travers les GHT. Avec un but clair : l’accès à des soins spécialisés de qualité et en toute sécurité doit être garanti à tous. Ce qui ne signifie pas « pouvoir bénéficier en proximité de tous les soins mais que chacun soit orienté vers les lieux de soins adaptés à ses besoins et à son état de santé ». En somme, pas tout partout mais ce qu’il faut où il faut. Dans le collimateur, la chirurgie dispersée au sein d’un trop grand nombre d’établissements, lesquels ne sont pas forcément « en capacité de garantir la qualité et la sécurité des soins du fait de l’absence de professionnels formés en nombre suffisant ou de la faible activité réalisée », précise le ministère. Aucun chiffre relatif à la fermeture de plateaux techniques ou aux regroupements de services n’a toutefois été annoncé officiellement.
En revanche, le Gouvernement a communiqué sur un calendrier. La révision des activités hospitalières soumises à autorisation aura lieu en deux temps :
- en 2020 pour les activités les plus structurantes sur les territoires, notamment les services d’urgence, les maternités, les services de réanimation, l’imagerie et la chirurgie ;
- en 2022 pour les autres activités.
Une gouvernance plus médicale
Le Gouvernement a entendu le souhait du corps médical et des soignants de reprendre un peu plus de poids dans la gouvernance hospitalière. Il crée ainsi une Commission médicale d’établissement (CME) au niveau des GHT. En outre, il souhaite renforcer et élargir les compétences de toutes les CME afin de mieux impliquer les médecins au pilotage des hôpitaux. La remise au goût du jour des services participe également de ce rééquilibrage. L’objectif ? Redonner au service « son rôle de “collectif” dans l’organisation des activités de soins et le management de l’équipe soignante ». Il s’agira également de favoriser la reconnaissance collective par la création d’un dispositif d’intéressement lié aux projets d’amélioration de la qualité de service. Enfin, le Gouvernement souhaite que les compétences en management dans la nomination des responsables médicaux soient mieux prises en compte.
Un statut unique de PH
Enfin il est prévu de créer un statut unique de Praticien hospitalier (PH), lequel s’accompagnera de la suppression du concours de PH. Objectifs avoués : faciliter l’entrée dans la carrière, diversifier les parcours professionnels (reconnaissance des valences non cliniques) et promouvoir l’exercice mixte (activité hospitalière et une activité libérale intra ou extrahospitalière). L’idée, comme pour la remédicalisation de la gouvernance des hôpitaux, est de redonner de la souplesse et du sens à l’exercice à l’hôpital.
Une amorce de réforme de la T2A
En matière de financement, le Gouvernement avance prudemment et n’annonce pas de big bang de la Tarification à l’activité (T2A). Il enclenche toutefois un mouvement de fond visant à rémunérer l’activité hospitalière en fonction de la pertinence des soins et des prises en charge plutôt que de la quantité d’actes. Le financement en fonction d’indicateurs de qualité va être renforcé. Le Gouvernement a prévu d’y consacrer, dès 2019, une enveloppe de 300 millions d’euros. Et, dès l’année prochaine également, seront créés deux forfaits de prise en charge à l’hôpital, l’un pour le diabète, l’autre pour l’insuffisance rénale chronique. Ces financements seront « élargis à partir de 2020 à d’autres pathologies et cette démarche inclura, par la suite, la prise en charge en ville en vue d’une meilleure coordination ville-hôpital ».
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